LE BLOG DU PÔLE ACCUEIL à DOMICILE

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PROFESSIONNELS


LA SECURITE DURANT LES PROMENADES

 

VOUS POUVEZ AIDER LES ENFANTS A COMPRENDRE LEUR ENVIRONNEMENT TOUT EN LES PROTÉGEANT

 

 

AVEC UN ENFANT DANS LA POUSSETTE

 

Même dans la poussette, lors qu’il ne marche pas encore, l’enfant est vulnérable.

Pensez à l’attacher systématiquement avec son harnais de sécurité, car au fil des mois, il va de plus en plus bouger, s’intéresser à tout ce qui l’entoure et une chute est très vite arrivée.

Ne suspendez pas de sacs lourds au guidon, au risque de voir basculer la poussette et l’enfant avec.

Pensez toujours à bloquer la poussette avec le frein lorsque vous vous arrêtez, que vous soyez sur une rue en pente ou non, placez-la systématiquement perpendiculaire à la pente.

Ne le laissez jamais seul, sans surveillance, même quelques minutes : il pourrait se pencher et faire tomber la poussette, avaler quelque chose et s’étrangler, se faire agresser par un autre enfant….

Vous devez pouvoir le voir, pour sa sécurité, et lui parler pour lui décrire ce qui l’entoure,  pour son éveil.

Votre rôle de professionnelle ne se limite pas à « promener » l’enfant, vous devez être en interaction avec lui, pas au téléphone ou en discussion incessante.

Vous ne devez pas vous limiter à « faire prendre l’air » à l’enfant….il faut donner aussi un sens pédagogique à cette promenade par le dialogue ou par la verbalisation de ce qui l’entoure.

Au téléphone vous ne serez pas attentive à l’enfant, trop concentrée sur votre conversation, vous risquez de ne pas entendre ses pleurs, de ne pas répondre à ses demandes, de ne plus être dans la surveillance pour sa sécurité, ni dans l’échange.

L’entretien de la poussette est important : vérifiez ses équipements régulièrement (freins, roues, réglage du harnais…)

N’oubliez pas de vous munir, d’une couverture en hiver et d’un protège pluie toute l’année.

 

AVEC UN ENFANT QUI MARCHE

 

L’enfant marche et commence à apprendre la rue et la circulation, sous vos yeux  attentifs. Servez-vous de son propre environnement pour l’aider à comprendre comment tout cela fonctionne

Il ne connait pas encore sa droite de sa gauche. Il est donc nécessaire de lui donner des indications matérielles comme : tu donnes la main du côté des maisons, c’est à gauche….

L’enfant doit progressivement devenir acteur de sa sécurité : il doit demander votre main si vous ne lui proposez pas, et peu à peu, savoir reconnaitre les espaces où il peut la lâcher.

Interrogez-le aussi pour qu’il trouve lui-même les réponses et ainsi vérifier où  il en est de sa connaissance des dangers de la route : où dois-tu t’arrêter lorsque tu veux traverser ?, à quoi dois-tu faire attention avant de traverser …

Il est de petite taille : son panorama visuel peut-être masqué par les voitures stationnées.

Vous pouvez lui expliquer que de la même façon, les conducteurs ne le voit pas forcément, encore plus quand la voiture recule….il faut qu’il comprenne qu’il doit tout le temps faire attention à lui.

L’enfant a du mal à évaluer également les distances et à distinguer les véhicules à l’arrêt de ceux qui roulent doucement. Pour cette raison il est important de ne pas se lasser d’expliquer.

De la même manière il a encore du mal à discerner l’origine des sons, surtout en ville, il aura donc plus de mal à  entendre venir le danger. Et cela ne sera pas de sa faute !

Courir donc après un ballon ou vers ses parents qu’il vient d’apercevoir de l’autre côté de la rue va monopoliser toute son attention et il en oubliera de regarder avant de traverser !

Car c’est encore difficile pour lui de concentrer son attention sur plusieurs actions simultanées !

Les enfants dont vous vous occupez, n’auront jamais une totale autonomie, car ils sont trop jeunes pour bien comprendre tous les dangers de la rue…donc en attendant…vous pouvez les équiper pour améliorer leur visibilité : vêtements de couleurs claires ou vives, bandes réfléchissantes sur leur sac à dos…

Les enfants n’ont réellement la notion du danger que tardivement, au plus tôt à 6 ans ils commencent à le percevoir (cela dépendra de la maturité de l’enfant).

C’est donc à vous de leur expliquer ce  qui est dangereux et pourquoi c’est dangereux, que ce soit dans la rue ou au parc.

 

AU  PARC

 

Ici aussi il faut veiller sur l’enfant, car il joue, est dans la découverte de son environnement et expérimente.

Il est important de privilégier les parcs où les jeux sont adaptés à l’âge des enfants dont vous vous occupez.

S’il n’arrive pas seul à monter au toboggan….c’est qu’il n’est pas prêt encore pour cette expérience…si vous l’aidez il risque de ne pas évaluer le danger, donc attention !

S’il est capable de le faire seul…cela ne voudra pas dire qu’il est complètement autonome, il aura besoin de votre protection, de votre accompagnement.

 

Mais malgré votre vigilance, une chute est vite arrivée, ne pas oublier de toujours emporter  une trousse de secours pour prodiguer les premiers soins.

 

Attention aux portillons, qui souvent ferment mal.

Mais même s’ils ferment….attention aux personnes qui oublient de les refermer, les enfants le remarqueront tout de suite…

 

Grâce à vous les enfants apprendront plein de choses durant les promenades  : 

 

  • Ne pas toucher un chien que l’on ne connait pas
  • Ne pas toucher les papiers sales ou autres qui trainent par terre
  • Ne pas courir avec quelque chose dans la bouche
  • Faire attention aux dangers de la rue
  • Ne pas s’éloigner de vous
  • Demander de l’aide en cas de besoin
  • Ne pas sortir du square sans vous, même si le portillon est ouvert
  • Ne pas partir avec quelqu’un que l’on ne connait pas
  • Se positionner près du mur et tenir la poussette
  • Durant la visite du marché : les fruits, légumes, viandes, poissons, fromage, couleurs…
  • Les couleurs des arbres, le nom des oiseaux…

 

 

L’enfant que vous gardez est sous votre entière responsabilité, que ce soit au domicile ou dehors. Vous devez donc rester vigilante en permanence, durant la sieste ou la journée, et ne jamais le laisser seul ou sans surveillance.                                                                                                                                                                    


30/01/2024


UN BB MEURT EN CRECHE : comprendre n'est pas excuser, mais chercher à prévenir

 

Un bébé meurt en crèche : comprendre n’est pas excuser, mais chercher à prévenir

Le 22 juin à Lyon, une fillette de 11 mois a été forcée à ingérer de la soude caustique par une professionnelle excédée. Les témoignages de maltraitances se multiplient depuis, mais quid de leurs effets ?

Un bébé meurt d’avoir été intoxiqué par une auxiliaire excédée dans une crèche en France ? La belle affaire !

Il va de soi que cette auxiliaire est un monstre et que sa cruauté barbare en témoigne… Circulez, il n’y a rien à voir. Voilà qui nous rassure à peu de frais alors même que la chose est beaucoup plus complexe.

Si cette professionnelle était excédée, cela mérite peut-être d’être examiné…

S’occuper des bébés des autres n’a en effet rien à voir avec le fait de s’occuper de ses propres enfants. Il s’agit d’un métier difficile et qui pourtant demeure peu valorisé. Dans un pays comme le nôtre, j’exagère à peine, plus on s’occupe d’enfants jeunes, moins on est payé !

C’est pourtant un métier qui exige tout d’abord une formation rigoureuse puis un accompagnement soigneux et continu des professionnel.le.s qui s’y trouvent engagés. Les professionnel.le.s ne peuvent en effet prendre soin correctement des enfants qu’on leur confie que si — et seulement si — l’institution qui les emploie prend elle-même correctement soin d’eux. Il y a là une évidence dont on se demande bien pourquoi il faut la rappeler sans relâche. Ne pas reconnaître les professionnels équivaut en fait à ne pas reconnaître les enfants. Et c’est là que le bât blesse.

L’importance de l’ambivalence 

Depuis l’essor phénoménal de la psychologie du développement, de la psychopathologie périnatale et de la psychiatrie du bébé depuis 30 à 40 ans, nous savons mieux aujourd’hui quels sont les besoins fondamentaux des tout-petits et pourtant nous ne parvenons pas encore à mettre en œuvre toutes ces nouvelles connaissances. Quels sont les freins, quelles sont les résistances ?

Selon les pays, il peut certes y avoir des contraintes économiques, administratives ou politiques qui entravent la translation des connaissances vers les équipes de terrain, mais cela n’explique pas tout.

À mes yeux en effet, le facteur le plus important est l’ambivalence que tout adulte peut éprouver envers sa propre enfance et envers l’enfant qu’il craint, à tort ou à raison, d’avoir été, ambivalence qui risque alors de se retourner sur les enfants dont nous avons la responsabilité. S’il n’y avait pas cette ambivalence, comment pourrions-nous expliquer l’insuffisance de formation des personnels de crèches ou des lieux d’accueil des tout-petits en général alors que chacun sait désormais que les premières années de la vie des enfants sont décisives et porteuses d’enjeux à court, moyen et long terme ?

Je préside depuis 2007 l’Association Pikler Lóczy-France qui effectue un énorme et merveilleux travail en matière de formation et je vois bien l’importance de cette formation ainsi que la nécessité absolue d’un soin du soin, ou d’un soutien au soutien, au travers de l’accompagnement continu des personnels. Les crèches privées sont théoriquement astreintes au même devoir de formation continue de leur personnel que les crèches publiques, mais le contrôle de ces formations y est souvent largement insuffisant !

S’il n’y avait pas cette ambivalence, comment expliquer le nombre insuffisant de crèches et de pouponnières ? On ne recense actuellement que 471 000 places en crèche soit un tiers de l’accueil des enfants de moins de trois ans alors que l’accueil en crèche demeure le mode d’accueil préféré des Français.

S’il n’y avait pas cette ambivalence, à laquelle s’ajoute probablement une acceptation sociale encore imparfaite du travail des femmes, comment expliquer l’idée saugrenue que les crèches soient payantes à la différence de l’école ?

S’il n’y avait pas cette ambivalence, comment expliquer que nos politiques de santé soient encore si défaillantes à propos de la petite enfance en général ? Nous attendions un ministère de l’Enfance qui, une fois de plus, n’aura pas vu le jour.

Une logique de rentabilité

À tout ceci s’ajoute que comme les EHPAD et les hôpitaux, le secteur des lieux d’accueil de la petite enfance est confronté à une logique de rentabilité peu compatible avec le soin, ce que nous répétons sans relâche et sans jamais être entendus.

Il y a un véritable boom des crèches dites « lucratives » puisque dans ce secteur, le nombre de berceaux qui était de 22 000 en 2012 est passé aujourd’hui à plus de 80 000 ce qui se traduit dans le fait que 80 % des places créées en crèche l’ont été dans le secteur privé. En crèche, le ratio d’enfants par adulte est de cinq enfants qui ne marchent pas et de huit enfants qui marchent par adulte, ratio qui ne tient évidemment pas compte des éventuelles pauses ou absences liées à la réalisation de tâches annexes.

Or ce ratio est régulièrement revu à la hausse dans le but de créer des places, en 2010 par Nadine Morano puis plus récemment par Adrien Taquet en 2021. Le rapport rédigé en 2020 par la Commission des 1000 premiers jours proposait un ratio de cinq enfants par adulte tous âges confondus, mais ce rapport n’a en fait jamais été suivi de la moindre mesure concernant l’accueil des jeunes enfants.

La qualité du soin : Un impératif catégorique 

Reste aujourd’hui le rapport  sur les modes d’accueil des enfants de moins de trois ans rédigé par Sylviane Giampino, présidente du Haut Conseil de la Famille, de l’Enfance et de l’Âge, qui a fait date en 2016 par son intelligence, sa profondeur, son sens des réalités et qui devrait, enfin, inspirer nos décideurs politiques qui n’ont pas la science infuse.

La qualité des soins précoces apportés aux tout-petits est un impératif catégorique au sens kantien du terme qui devrait se suffire à lui-même et qui n’a besoin d’aucun argument hors champ.

Il se trouve cependant que les neurosciences viennent aujourd’hui confirmer de manière éclatante les savoirs plus anciens des cliniciens en insistant sur le fait que la manière de s’occuper des tout-petits a très probablement des effets épigénétiques à long terme sur le développement de la personne.

On voit donc ici, très clairement, les ravages du néo-libéralisme qui rend aveugle et sourd aux besoins fondamentaux du développement des tout-petits, besoins auxquels on ne peut pourtant répondre qu’au sein d’un environnement relationnel soigneusement pensé.

La mort de cette enfant est inacceptable.

La professionnelle responsable de ce crime est inexcusable.

Mais comprendre n’est pas excuser, comprendre c’est chercher à prévenir la répétition de tels événements.

Ne pas chercher à comprendre est en revanche de l’ordre d’un manquement éthique dont nous serions alors tous responsables.


02/11/2022


FORTES CHALEURS ET ACCUEIL DE LA PETITE ENFANCE

Fortes chaleurs et accueil de la petite enfance

Différence canicule/fortes chaleurs :

On parle de canicule lorsque les températures restent anormalement élevées de jour comme de nuit pendant au moins 3 jours. Si, pendant une semaine, les températures en journée sont très élevées mais qu’elles descendent la nuit, alors, on parle de vague de chaleur ou de fortes chaleurs. Pour exemple, à Paris, l’alerte canicule est déclenchée lorsque les températures minimales sont de 31° dans la journée et 21 la nuit, dans les Deux-Sèvres la canicule sera avérée quand les températures minimales de 35°C le jour et 20°C la nuit seront observées. A Marseille, ce sera 35°C le jour et 24°C la nuit pour que le plan canicule soit déclenché.
En cas de fortes chaleurs, il faut savoir qu’aucune indication de température maximale au-delà de laquelle il serait dangereux ou interdit de travailler n’existe dans le code du travail.

Certaines dispositions existent cependant :

L’employeur doit mettre à disposition de l’eau fraîche et potable (article R.4225-2 et suivants du code du travail). Eau potable ne signifie pas eau en bouteille. En effet, si des robinets sont à disposition, l’employeur n’est pas tenu de donner des bouteilles.
L’employeur est tenu de renouveler l’air des locaux fermés, en évitant les élévations exagérées de températures (article R.4222-1).
En cas de « vigilance rouge » de Météo France, l’employeur, au titre de son obligation de sécurité, doit procéder à une réévaluation quotidienne des risques pendant la période de la vigilance en fonction :

  • De la température et de son évolution en cours de journée
  • De la nature des travaux devant être effectués
  • De l’âge et de l’état de santé des travailleurs : il devra alors particulièrement veiller aux femmes enceintes ou aux personnes souffrant de maladie chronique

L’employeur peut accorder des pauses plus fréquentes ou plus longues.

En ce qui concerne la réglementation « Petite Enfance » :

L’arrêté du 31 août 2021 créant le référentiel national relatif aux exigences applicables aux EAJE, précise :
En période fortes chaleurs et canicules, il est recommandé par l’ADEME que la température intérieure ne soit pas inférieure de plus de 5° à 7°C par rapport à la température extérieure à l’établissement, et que le Plan ORSEC de gestion sanitaire des vagues de chaleur soit mis en place. (article II.4.1 de l’Annexe1)

Si la température intérieure est excessive, si l’employeur ne fournit pas l’eau nécessaire aux salariés, ceux-ci peuvent exercer leur droit de retrait.

Rappel : L’exercice du droit de retrait des salariés s’applique strictement aux situations de danger grave et imminent. Mais le droit de retrait doit être exercé de telle manière qu’il ne puisse créer pour autrui une nouvelle situation de danger grave et imminent (article L-4132-1 du code du travail). Cela implique que le droit de retrait ne peut pas être exercé si le risque concerne les personnes extérieures à l’entreprise, notamment les usagers (circulaire DRT n°93/15 du 26 mars 1993).

Ressources disponibles


21/06/2022


La violence intrafamiliale

Les nourrissons confrontés à la violence intrafamiliale présentent un risque de retard cognitif

Les enfants vivant dans le même foyer qu’un homme violent présentent de moins bons résultats aux tests cognitifs.

Même lorsqu’ils ne sont pas eux-mêmes victimes de maltraitance au sein de leur famille, les enfants exposés aux violences conjugales présentent un risque plus important de retard cognitif. Ces violences vont retentir sur l’ensemble de leur personnalité, sur leur organisation psychique et leur développement.

C’est la conclusion à laquelle est parvenue l’ancienne infirmière Linda Bullock. Dans une étude publiée dans a revue Maternal Child Health Journal, celle qui est aujourd’hui professeure émérite à la Sinclair School of Nursing de l'université du Missouri (États-Unis) s’est intéressé aux conséquences des violences conjugales sur le développement psychologique et cognitif des enfants.

Une étude des violences intrafamiliales

Le point de départ de ses travaux remonte aux années 1980, lorsqu’elle a remarqué des ecchymoses sur le corps d’une femme enceinte souffrant de travail prématuré qu’elle évaluait. Lorsqu’elle l’a interrogée sur l’origine de ses blessures, la femme lui a répondu que le réfrigérateur lui était tombé dessus alors qu’elle faisait le ménage.

"Quelque chose ne semblait pas normal, mais je ne savais pas quoi dire à ce moment-là. Je suis simplement passée à la question suivante de l'évaluation, se rappelle Linda Bullock. Nous avons arrêté le travail et l'avons renvoyée chez elle, mais je parie mon dernier dollar que je l'ai renvoyée dans une relation violente, et cela a éveillé mon intérêt pour aider d'autres infirmières à aider les femmes battues. Ce que nous ne savions pas à l'époque, c'était l'impact de la violence sur le bébé."

 

L’impact d’une figure paternelle violente

Instigatrice du programme DOVE Domestic Violence Enhanced Perinatal Home Visits) venant en aide aux femmes victimes de violence conjugale dans les zones rurales du Missouri, Linda Bullock a remarqué que de nombreuses femmes maltraitées avaient eu jusqu'à neuf partenaires romantiques différents pendant et après leur grossesse. Elle a donc souhaité examiner l'impact de la multiplicité des figures paternelles sur le développement cognitif des nouveau-nés.

Pour le savoir, elle a réalisé des tests de développement neurologique lors de visites à domicile trois, six et douze mois après la naissance Elle a alors constaté que les nourrissons des femmes qui n'avaient eu qu'un seul partenaire masculin qui les avait maltraitées avaient des résultats cognitifs moins bons que ceux des femmes ayant eu plusieurs partenaires masculins, dont certains seulement étaient violents.

D’autres travaux ont déjà montré par le passé que les enfants grandissant au sein d’un foyer violent avaient souvent de moins bons résultats scolaires en raison de retards de développement neurologique et étaient davantage exposés à divers problèmes de santé, notamment des troubles gastro-intestinaux, des difficultés à manger et à dormir, ainsi qu'au stress.

"Lorsque les infirmières se rendent à domicile pour surveiller les femmes enceintes et leurs bébés en développement, nous voulons qu'elles soient formées à reconnaître les signes avant-coureurs d'une éventuelle violence entre partenaires intimes, souligne la Pr Bullock. Je repense encore à 1983, lorsque j'ai renvoyé cette dame chez elle dans une situation terrible, et je suis passionnée par le fait de m'assurer que je peux aider les infirmières d'aujourd'hui à ne pas faire la même erreur que moi." 


20/10/2021


Pourquoi se priver de câlins ou de bisous à la crèche

Pourquoi devrait-on se priver de câlins ou de bisous à la crèche ?

 En France, depuis une vingtaine d'années environ, le secteur de la petite enfance est jalonné d’innombrables interdits, venant parfois brimer la spontanéité et l’authenticité de la relation entre l’adulte et l’enfant. Mais sont-ils tous légitimes ? Attention, sujet tabou, et donc hautement sensible prévient Héloïse Junier, psychologue en crèche, qui ose dire tout haut ce que beaucoup pensent tout bas !

« Je sortais tout juste d’une formation d’auxiliaire de puériculture après un parcours de 10 années en entreprise, en Direction des Ressources Humaines. A la grande surprise de mon entourage, j’ai choisi de me réorienter dans la petite enfance – quitte à diviser mon salaire par deux – car je souhaitais, à 36 ans, exercer un métier 100% humain, essentiel, authentique, vrai. Bref, tout ce qui m’avait manqué en DRH ! Arrivée sur le terrain, dans une crèche collective de 60 berceaux chapeautée par un groupe privé, j’ai rapidement déchanté. Dès la fin de ma première semaine, l’EJE – une jeune fille pleine de certitudes, voyant que je n’étais pas du milieu, m’a mise au parfum de manière assez cash : ‘’Ici, pas de bisous, pas de câlins, pas de caresses, pas de surnoms, pas de ‘’ma grande’’ – ‘’mon cœur’’. C’est pas tes enfants, ok ? [Ayant déjà deux enfants, j’avais bien remarqué que ces enfants n’étaient pas sortis de mon utérus, mais au vu de ma situation, je faisais mieux de ne pas la ramener !]. Et aussi, hier tu as chanté « No woman, no cry » avec les enfants. Ça ne va pas le faire non plus. Ça serait mieux si tu t’en tenais aux chansons pour enfants, vu ? T’es pas chez toi, ici, t’es au travail !’’ Deux mois plus tard, voyant que cette EJE disait vrai et que je n’étais pas sortie de l’auberge, j’ai filé à la PMI demander un agrément pour m’installer en tant qu’assistante maternelle. 15 ans et 39 enfants accueillis plus tard, je me souviens de cette scène comme si c’était hier !  » raconte Sylvie, assistante maternelle dans le Val d’Oise. Ce témoignage, comme il y en a beaucoup d’autres, nous permet d’aborder un débat sensible et particulièrement tabou dans la petite enfance : celui des multiples interdits régnant dans les EAJE.


Certains interdits sont discutables

Nous retrouvons dans les EAJE des interdits indiscutables, fondés sur le seul respect de l’enfant : il est interdit de frapper un enfant, de l’humilier, de l’isoler, de le punir, de le menacer, de lui enfoncer une cuillère dans la bouche pour le forcer à manger, de le négliger, de se montrer indifférent à ses demandes, de le discriminer, de le traiter de « méchant garçon », d’enfant « capricieux » ou « mal élevé », etc. L’ensemble de ces interdits, fondamentaux, sont une évidence. Parallèlement, dans certains EAJE (mais aussi dans certaines PMI qui encadrent les assistants maternels) d’autres interdits – plus discutables – sont érigés comme des vérités depuis des générations et des générations de professionnels. Certains de ces interdits sont des dérives issues des recommandations des courants basés sur la bien-traitance. D’un côté, les réflexions promouvant à la bien-traitance ont permis de développer des pratiques plus adaptées aux besoins des jeunes enfants. Le revers de la médaille est que l’on a fini par décortiquer à outrance les pratiques et par voir des douces violences, et des violences, là… où il n’y en avait pas forcément. L’objectif de cet article est alors d’interroger la légitimité actuelle de ces interdits (et, finalement, d’énoncer tout haut ce que beaucoup de professionnels pensent tout bas !).  Prêt à aborder un sujet ébouriffant ?

« Pas de mots gentils », « pas de caresses »

Les marques d’affection seraient réservées aux parents
Selon un courant de pensée traditionnellement ancré dans les crèches, et en partie psychanalytique, les marques d’affection seraient « réservées » aux parents. On en vient à interdire aux professionnels de faire des câlins et des bisous pour ne pas briser la symbiose mère-enfant, pour ne pas « voler » la place sacrée du parent. La tendresse, la proximité physique, les gestes d’affection étaient vus d’un mauvais œil. Or, depuis une quinzaine d’années, les travaux en neurosciences et sur la théorie de l’attachement posent un regard très différent sur cette question de la tendresse dans les structures d’accueil. Ces nouvelles données nous enseignent à quel point l’enfant a besoin de marques d’affection et de tendresse de la part des adultes pour se construire, pour aider à la maturation de son petit cerveau. Mais aussi pour établir un lien d’attachement de qualité avec ceux qui l’entourent.

Quid des enfants qui passent 50h par semaine loin de leurs parents ?
Certains professionnels estiment donc que « les gestes affectueux – tels que les bisous, les caresses, les câlins – sont réservés aux parents ». Oui et non. Car nous oublions qu’un enfant passe 8 à 10 heures par jour loin de ses parents, près de 50 heures par semaine, 48 semaines par an pendant quasiment 3 ans, soit environ… 7 200 heures loin de ses parents rien que ses trois premières années de vie, à une période où son cerveau construit une grande partie de ses fondations ! Il s’agit donc de ne pas le sous-alimenter. Et notre responsabilité est très grande. Pendant ces longues périodes loin des bras de ses parents, son cerveau a notamment besoin d’ocytocine, cette hormone de l’attachement sécrétée lors des rapports humains tendres, empathiques et affectueux. Certes, nous pouvons aussi sécréter cette hormone par un regard ou une parole. Toutefois, le rapport physique bienveillant, le geste affectueux, le câlin (et notamment les caresses de l’enfant sur sa peau) restent la voie royale de la sécrétion de l’ocytocine.  

Forcer un enfant, non. Lui proposer, oui.
Forcer un enfant à faire un bisou/ un câlin ? Sûrement pas car la notion de consentement est primordiale. Lui proposer un bisou/ câlin ou répondre à sa demande ? Pourquoi pas, car l’enjeu est différent. L’essentiel est de respecter les particularités de chacun (adultes, enfants et parents) et de ne surtout pas brimer ce rapport physique aux enfants sous l’égide d’interdits discutables. Et, une bonne fois pour toutes, cessons définitivement de parler de « juste distance » et privilégions le terme de « juste proximité » !  

 « On ne racle pas la bouche de l’enfant avec la cuillère »

Le fait d’enlever l’excédent de purée de la bouche d’un enfant à l’aide d’une cuillère est historiquement qualifié de « douce violence » au point d’être proscrit dans de nombreux établissements. D’où vient cet interdit ?

Les dérives d’un courant bien-traitant
Une petite note historique s’impose. Au début, dans les crèches, l’accent était mis sur l’hygiène et le soin. Les gestes pouvaient être froids et automatiques, sans affect, sans individualité, sans prise en compte des besoins du petit enfant que l’on avait en face de soi. Nous avons tous en tête des images de professionnels d'après-guerre qui nourrissaient les enfants à la chaîne et leur raclaient la bouche avec nonchalance, machinalement. Après quoi a émergé de double courant -essentiel- de la bien-traitance (avec les apports de Danielle Rapoport) et des douces violences (selon les travaux de Christine Schuhl). Dans la défense du respect de l’enfant, ce mouvement pédagogique est venu – à juste titre – pointer du doigt les gestes robotisés des professionnels pendant les temps de change et de repas, ainsi que les surnoms dévalorisants qui leur étaient parfois attribués (« mon pépère », « la mégère »…). Grâce à ces avancées pédagogiques, les pratiques professionnelles ont largement gagné en bientraitance ! Le revers de la médaille est qu’au fil du temps, dans certains établissemenst, sur le terrain, ce courant a fini par dériver vers un contrôle excessif des pratiques professionnelles sous l’égide d’un pseudo-respect de l’enfant, laissant entrevoir des maltraitances là où il n’y en avait pas. Au point qu’aujourd’hui, des établissements en viennent à interdire des gestes du quotidien (comme par exemple racler la bouche d’un enfant avec une cuillère) sans les distinguer de l’intention de l’adulte qui l’effectue (qui peut être bienveillante ou malveillante).

L’importance de distinguer le geste de l’intention de l’adulte
Prenons un cas concret. Quand un bébé a de la purée autour de la bouche, vaudrait-il mieux lui laisser la bouche avec de la purée pendant tout le repas ? Ou bien l'essuyer avec un bavoir lui-même tâché de purée ? Il est fort probable que le bébé se fiche littéralement de savoir comment l’adulte lui enlèvera ce surplus de purée. Ce qui le préoccupe lui, à ce moment précis, c'est la tendresse et l'humanité du professionnel qui lui donne son repas, c'est ce jeu de regard, ses paroles bienveillantes, ces sourires partagés, ses caresses. Du moment que ce geste est fait avec bienveillance et douceur, pourquoi alors l'interdire ? « Ancienne directrice de crèche j'avais en tête qu'il s'agissait d'une douce violence... Mais quand je me suis retrouvée face à ma fille pleine de compote j'ai fait naturellement ce geste. Je n'ai pas eu l'impression de la gêner, elle a continué son goûter toute souriante. En verbalisant et en le faisant en douceur il n'y a pas de raison que l'enfant le vive mal ! » témoigne Aurélie, éducatrice de jeunes enfants.
Certains professionnels rétorqueront « Non, nous devons plutôt essuyer le visage de l’enfant avec une serviette comme on le ferait pour un adulte ! » (ce qui pourrait être une bonne idée si les quantités de purée sur le visage d’un enfant pendant un repas n’étaient pas aussi importantes comparées à celles d’un adulte !). Mais en quoi l’usage de la serviette préserverait-il davantage l’enfant ? N’a-t-on jamais vu de professionnel essuyer le visage d’un enfant par surprise, avec force et brutalité ? Doit-on dans ce cas interdire aux professionnels d’essuyer le visage des enfants avec une serviette ? Vous l’aurez compris, ce débat repose en réalité sur cette sacrosainte confusion entre l’outil et son usage, entre le geste et l’intention. Il se doit d’être traité avec intelligence et modération. Car ce qui compte n’est pas l’outil en soi mais bel et bien l’intention de l’adulte qui effectue le geste !

« Il est interdit d’écouter des chansons pour adultes, de danser en section… »
 « L’un de mes meilleurs souvenirs de crèche était un lundi matin d’hiver. Il pleuvait, il faisait froid. Personne n’avait envie d’être là, c’est évident. C’est alors qu’une des pros s’est mise à chanter à tue-tête « The show must go on » comme l’aurait fait Freddie Mercury 20 ans plus tôt ! Aussitôt, ses collègues en ont fait de même. Elles chantaient toutes affreusement faux mais c’était émouvant ! Les enfants étaient scotchés. Certains rigolaient, d’autres dansaient, d’autres restaient bouche bée, complètement fascinés par ce spectacle humain à taille réelle… » se souvient Johanna, psychologue de crèche.

Du moment qu’ils demeurent ponctuels et raisonnables, pourquoi donc vouloir supprimer ces élans d’adultes ? Font-ils réellement du tort à l’enfant ? Toutes ces actions relèvent de la vraie vie, du naturel. A son domicile, l’enfant vivra d’ailleurs des situations similaires. Parmi les apprentissages, il y en a un qui est essentiel, c’est celui de la joie de vivre. Car oui, il s’apprend ! De plus, l’enfant a besoin de se construire une connaissance des humains en les voyant évoluer naturellement, spontanément. Si les humains de la crèche ne sont pas représentatifs des humains en général, l’enfant risque de ne pas s’y retrouver ! Ces interdits spécifiques sont là encore une dérive de la sacro-sainte distance et posture « professionnelle », au détriment de la vraie vie. Une fois de plus, tout est donc une question de modération et de mesure.

A force de se couper les cheveux en quatre, on risque de ne plus en avoir beaucoup sur le crâne !
A cause de ces multiples interdits, de très nombreux professionnels estiment que les lieux d’accueil actuels sont en voie de devenir des lieux trop aseptisés, trop normés, trop formatés. On reproche à ces interdits de ternir l’humanité et la spontanéité du métier, le risque étant de retomber dans des pratiques distantes et dépourvues d’affect que l’on a si longtemps condamnées. On leur reproche également de développer à outrance l’auto-contrôle des adultes (« oh mince, la psy vient d’arriver, il faut que je pense à ne pas appeler les enfants « mon grand » ou « ma grande » jusqu’à ce qu’elle soit partie !). Et risque donc nuire à l’authenticité des rapports humains, à la qualité de la relation entre les professionnels et les enfants et ainsi, quelque part, au bien-être des enfants accueillis. Il arrive que les professionnels eux-mêmes se retrouvent dans une forme de dissonance cognitive, quand on leur demande de faire – ou de ne pas faire – quelque chose pour lequel ils ne sont pas d’accord. Ce décalage entre ce qu’ils font et ce qu’ils voudraient faire peut induire un décalage, une pratique bancale, comme plaquée. D’où la nécessité de réinterroger le sens de ces interdits et le « pourquoi ». « Pour avoir dirigé une crèche durant près de 10 ans, je sais à quel point la pression exercée sur les professionnelles est forte et certains concepts pédagogiques difficiles à comprendre. Je me suis moi-même perdue devant tant d'incohérences… C'est en partie pour cette raison que j'ai quitté mes fonctions il y a quelques mois » témoigne Sandrine, infirmière puéricultrice. Au lieu de multiplier ces interdits – qui en plus d’être discutables viennent infantiliser les professionnels – ne devrait-on pas plutôt les amener à développer leur sens des responsabilités et des nuances ? Il existe et il existera toujours un noyau de professionnels non bienveillants, peu à l’écoute du respect et des besoins de l’enfant. Etendre la liste des interdits ne changera rien à la situation. Car, martelons-le, l’origine du problème ne se situe pas dans l’action commise mais réellement dans l’intention de celui qui la commet.

On entend beaucoup parler de neutralité, de distance, d’autonomie, d’auto-contrôle (« vos problèmes, vous les laissez aux vestiaires ! »). A l’inverse, rares sont les projets pédagogiques à évoquer les termes de tendresse, de douceur, d’affection, d’attachement, d’humanité, de gentillesse, de complicité. Les enfants n’ont pas besoin de robots, mais d’êtres humains spontanés, vivants, parfois défaillants et résolument imparfaits.
Certes, l’enjeu est de limiter les dérives. Mais à quel prix ? Le seul fait de se poser la question est déjà, en soi, un début de réponse…  

 


20/10/2021